Consolidation Comptable Internalisée : Opportunités et Défis
Première partie
Consolidation Comptable Internalisée : Opportunités et Défis
Première partie
Introduction
La fonction de consolidation financière s’articule de différentes formes en fonction des contextes. D’une direction puissante au niveau central, à un département faisant partie de la direction financière du groupe, à une simple fonction annexée au département comptable, voir à une fonction totalement externalisée, l’éventail des formes d’organisation de cette discipline n’est pas simple à cerner. Cela s’explique par différentes raisons, néanmoins, il existe un premier niveau de distinction qui permet de faire une première catégorisation de ces formes d’organisation, à savoir l’internalisation ou l’externalisation de la fonction.
En effet, nous nous attelons dans cet article à essayer de décrypter la différence entre une fonction de consolidation internalisée par rapport à un modèle externalisé afin de comprendre les avantages et limites de chacun.
Dans cette première partie, nous analysons les enjeux de la consolidation financière, pour ensuite analyser l’organisation internalisé de la fonction afin de mieux comprendre ce modèle.
Nous compléterons cette étude en deuxième partie par le modèle externalisé avec une analyse comparative qui permettra de comprendre les avantages de chaque modèle afin de situer chacun d’eux dans son contexte adéquat.
Enjeux de la consolidation
La consolidation financière est une discipline qui consiste à produire une information financière à l’échelle d’un groupe selon un référentiel défini à l’attention d’un public généralement financier. L’exploration des éléments de cette définition simple nous permet de comprendre les enjeux de l’organisation de la consolidation financière.
Information financière
Ainsi, la consolidation financière est le mécanisme par lequel un groupe de société peut produire une information financière reflétant l’image fidèle à l’échelle du groupe. En effet, la comptabilité sociale comme système de base de l’information financière est caractérisée par une vision à prédominance légale et fiscale de l’image fidèle.
Cette vision, quoique nécessaire et importante à l’échelle d’une entreprise, devient rapidement obsolète quand il s’agit d’un groupe, d’où la nécessité de produire des comptes consolidés.
Cette nécessité est induite principalement par des motifs économiques et financiers. Actionnaires, bailleurs de fonds, investisseurs, marché financier … sont autant de parties prenantes intéressées par l’information financière consolidée d’un groupe.
L’information financière consolidée a deux propriétés qui intéressent ces parties prenantes :
– La vision groupe : l’information consolidées transcendes les frontières légales des entités pour restituer l’image du groupe consolidé, donnant ainsi une perspective de la taille économique du groupe. Ainsi, une holding financière qui détient une dizaine sociétés de distribution, n’affichera dans ses comptes sociaux que des titres de participation ne reflétant aucune activité commerciale ; alors qu’en réalité, cette holding a plus de poids économique que toutes ses filiales réunies considérant l’effet de synergie conféré par le contrôle économique exercé par la holding.
– La vision économique : étant donné la nature des parties prenantes intéressées par l’information consolidée, les comptes consolidés sont imprégnés d’une interprétation plus économique et financière de l’image fidèle. Ainsi, certains traitements comptables bien encrés dans la comptabilité sociale sont retraités en consolidation pour donner une vision plus économique des comptes. A titre d’exemple, les redevances de crédit-bail sont comptabilisées en sociale de manières similaires aux charges locatives dans les comptes d’autres charges externes, alors qu’une vision consolidée des comptes préconise une présentation du crédit-bail comme un investissement adossé à un financement sur la durée du contrat.
C’est ainsi que cette vision économique du groupe fait de l’information financière le premier enjeu de la consolidation.
A l’échelle d’un groupe
La finalité de la consolidation financière étant mise en évidence, il convient de préciser que cette finalité est intimement liée l’existence d’un groupe.
En effet à l’échelle d’une seule société, ces retraitements de l’information financière auraient été assimilés à un dispositif de comptabilité approfondie ou de reporting de gestion. En revanche, à l’échelle d’un groupe, la complexité est accrue, nécessitant une démarche bien spécifique, pour les raisons suivantes :
– Multitudes des sources d’informations : chaque filiale du groupe consolidé dispose de son propre système comptable et d’information financière. Consolider toutes les entités revient à mettre en œuvre les moyens nécessaires pour que l’information financière de ces différents systèmes, souvent hétérogènes, soit fusionnées (consolidées) dans une information financière groupe, reflétant la réalité économique du groupe. Au-delà des traitements techniques que cela entraine, d’un point de vue purement consolidation, déjà le fait de regrouper les différentes sources dans une information consolidée représente un enjeu majeur. Chaque entité ayant son propre plan de compte, qui peut différer plus ou moins de la société mère. Aussi, chaque entité peut avoir des pratiques et des méthodes comptables différentes, qu’il convient d’harmoniser.
– Multitudes des intervenants et des niveaux de décision : les différents systèmes composant l’information au sein du groupe, sont portés et gérés par différents équipes, plus ou moins étoffés et décentralisées. La consolidation au-delà de sa technicité, consiste aussi à fédérer toutes ses équipes pour harmoniser leurs actions vers une finalité commune de manière harmonieuse, sans pour autant empiéter sur les exigences et obligations existantes chez chaque filiale.
– Multitudes des systèmes d’informations : les systèmes d’information source, contenant l’information comptable de base des filiales, sont conçus pour répondre au besoin de la filiale, et n’intègre pas forcément cette dimension groupe de l’information. Ainsi, une partie des systèmes devient plus une contrainte dans le sens où son architecture est en inadéquation avec le reporting au niveau du groupe. L’information devra être ainsi retraitée pour pallier ces écarts générés par l’hétérogénéités des systèmes. Ces traitements peuvent être automatisés en rajoutant une brique applicative au niveau de la consolidation dont la finalité est d’homogénéiser les systèmes d’information existant en agissant au niveau du sommet de l’information afin d’éviter de refaire l’architecture existante qui répond aux besoins de chaque filiale.
– Multitudes des auditeurs : très souvent, l’information consolidée est une information auditée. L’audit de l’information consolidée est adapté aux spécificités de cette information, notamment par le fait qu’il est conduit à l’échelle de tout un groupe. Cela implique différents auditeurs, qui sont des commissaires aux comptes des filiales, et qui contribuent tous, chacun sur son périmètre à certifier l’information consolidée en plus de l’auditeur groupe, qui veille sur la certification de l’ensemble.
Les aspects évoqués ci-dessus sont abordés de façon synthétique pour donner au lecteur un aperçu des complexités que la consolidation est sensée gérée. Chacun de ces aspects peut être plus ou moins complexe en fonction du contexte de chaque groupe et la finalité de chaque consolidation. La consolidation pouvant être organisée de différentes façon, cette organisation se verra impactée par ces différents aspects et des complexités y afférentes.
Selon un référentiel
Normes IFRS, avis numéro 5 du CNC, CRC 99, USGAAP, UKGAAP … différentes appellations représentants différentes normes comptables et/ou d’information financière sont couramment utilisées en matière de consolidation financière. Le recours à ces normes se justifient par le fait que la consolidation requiert une harmonisation des traitements comptables, en privilégient une lecture financière des comptes. Cette lecture financière induit des traitements non usuels en comptabilités sociales, alors qu’ils sont très courants en consolidation.
Activation des contrats de location, constatation des impôts différés, élimination des non-valeurs sont quelques exemples de ces traitements.
En outre, d’autres traitements comptables, tels que les écarts d’acquisition, sont inhérents à la consolidation elle-même. De tels traitements ne s’appliquent pas et donc ne sont pas abordés en comptabilité sociale.
En substance, le processus de consolidation est un vrai processus de conversion des comptes passant d’un référentiel à un autre, voire de plusieurs référentiels à un autre dans le cas de groupe couvrant différentes législations sociales.
Pour un public financier
L’information financière consolidée s’adresse à un public financier. En effet, le besoin en consolidation, est d’abords une émanation du besoin de connaitre la réalité économique d’un groupe. Les premiers concernés par cette réalité sont le public des investisseurs et des bailleurs de fonds. Que ce soit sur un marché financier, ou dans des transactions financières privées, l’information financière consolidées est nécessaire.
Elle est justement nécessaire pour données une base fiable pour les projections financière des choix d’investissement et de financement du public visé. D’où la connotation financière de cette information. Cela se reflète à deux niveaux :
– L’orientation économique des traitements comptables : les comptes consolidés comprennent ainsi plusieurs traitements, tels qu’évoqués ci-dessus, qui visent à refléter les incidences financières qui n’aurait pas apparu en comptabilité sociales. Certains exemples sont déjà évoqués ci-dessus.
– Le détail de l’information, notamment au niveau des annexes, plus consistants et plus qualitatifs, visant à permettre aux investisseurs et aux bailleurs de fonds d’avoir une information de qualité à même d’asseoir une confiance entre investisseur/bailleur et investissement.
En résumé.
La consolidation est ainsi un processus complexe qui se base sur différentes sources d’information, impliquant des équipes hétérogènes, visant à produire une information financière de qualité reflètent une image fidèle économique à l’échelle d’un groupe.
La complexité de ce processus, et la variété des contextes font en sorte qu’il n’existe pas de modèle idéal de consolidation qui réponds à tous les besoins.
Après avoir mis en exergue les enjeux de la consolidation nous essayons en ce qui suit de répondre à une question simple : devra-t-on externaliser la consolidation ?
A travers cet article, nous essayons d’apporter des éléments de réflexion qui contribuent à apporter une réponse à cette question complexe, tout en rappelant qu’il n’existe pas de réponse toute faite ou d’organisation idéale, et qu’une analyse contextuelle approfondie doit être menée en réalité pour une organisation adaptée de la consolidation.
Nous commençons par exposer les caractéristiques d’une organisation internalisée. Ensuite, nous exposons la même analyse pour une organisation externalisée. En guise de synthèse, nous essayons de comparer les deux modèles pour ressortir les traits et critères qui favorisent un modèle comparativement à l’autre.
Organisation internalisée de la consolidation
Dans une organisation internalisée de la consolidation, le processus de consolidation est piloté principalement en interne, par un département ou une direction de consolidation, en charge de la production des comptes consolidés du groupe en interne. Cette organisation interne peut avoir différentes formes, qu’il n’est pas sujet de détailler dans cet article. En revanche, ces différentes formes ont des caractéristiques communes que nous essayons de mettre en évidence dans les paragraphes suivants.
Les directions financières des filiales
Dans une organisation internalisée de la consolidation, les directions financières des filiales, principal pourvoyeur d’information financière au processus de consolidation, sont impliquées de manière active dans le processus de consolidation.
A minima, les informations sont fournies de manière brute pour permettre à l’équipe de consolidation de réaliser les différents retraitements. Ces informations brutes sont fournies selon un format et un planning défini par l’équipe centrale. Ainsi, les directions financières, même s’ils ignorent le référentiel de consolidation, sont quand même amenées à comprendre les inputs attendus par l’équipe centrale.
Un rôle plus élaboré des directions financières consiste à réaliser une partie des retraitements déjà au niveau local, et fournir à l’équipe centrale une information déjà retraitée. Cela suppose une plus grande implication des filiales et également une certaines maîtrise du référentiel de consolidation.
Le département de consolidation
Le département de consolidation, dans une organisation internalisée, est un vrai pôle de compétence de l’information financière. C’est également un pilote central du processus d’élaboration des comptes consolidés et de leur audit.
Pour cela, l’équipe de consolidation requiert une légitimité qu’elle tire non seulement de sa position fonctionnelle et organisationnelle ; mais d’abords de sa compétence technique.
Cela n’exclut pas le recours des conseillers externes, qui apportent des réponses précises sur des sujets particuliers, ou un renfort en cas de surcharge conjoncturelle des équipes. Nonobstant, l’équipe de consolidation reste le pilote principal du processus.
Elle joue également un rôle de conseiller des filiales pour les assister à réussir leur contribution à la consolidation, car la réussite de l’équipe centrale dépend également de celle des équipes des filiales.
Autre rôle que le département de consolidation assure est la facilitation du reporting de gestion . En effet, quand ce n’est pas l’équipe consolidation qui produit le reporting de gestion consolidé, elle y contribue fortement.
Cette contribution se traduit par la production d’une partie de l’information de gestion, notamment des indicateurs bilantiels, ou à minima de produire une information financière auditable qui constitue un repère pour les contrôleurs de gestion du groupe pour confirmer la fiabilité des informations analytiques dont ils disposent.
Comme la comptabilité générale pour le contrôle de gestion d’une filiale, la consolidation constitue le repère le plus fiable pour le contrôle de gestion au niveau du groupe.
Certains groupes qui poussent les limites de l’intégration de l’information financière arrivent à disposer d’un seul référentiel de donnée utilisée à la fois pour l’information de gestion interne que pour l’information financière externe. Avec tous les avantages que cette organisation présente, elle suppose une forte intégration entre les fonctions de consolidation et de contrôle de gestion centrales, ce qui implique des équipes de consolidation une double compétence en consolidation et en contrôle de gestion.
Le conseil en consolidation
Le conseil en consolidation, dans une organisation internalisée, jour un rôle d’auxiliaire et de support au département interne de consolidation. Il apporte ainsi une expertise pointue sur des questions particulière qui peuvent surgir à chaque cycle de consolidation. En raison de nouveauté normatives ou d’opérations particulières rencontrées, l’équipe de consolidation peut être confrontée à une situation nouvelle que les services d’un conseil permettent de gérer plus efficacement quand tenu des délais et des effectifs inextensibles de l’équipe interne.
Aussi, le conseil peut également apporter son support pour absorber une augmentation de charge conjoncturelle et imprévue qui met en péril le respect des délais de clôture et de production des comptes consolidés. Les délais étant figés, face à cette augmentation de pression, un support externe reste une alternative viable pour ne pas impacter le délai ou la qualité de l’information. Quoiqu’elles semblent a priori peu probables, de telles situations peuvent se produire assez souvent pour diverses raisons, dont ci-après quelques-unes :
– Un accroissement des exigences en termes de reporting suite à des nouveautés normatives.
– Un accroissement des traitements de consolidation suite à une diversification de l’activité ou à un élargissement de périmètre.
– Le départ d’un membre de l’équipe de manière provisoire (ex : maternité) ou définitive (ex : démission).
– L’implication de l’équipe de consolidation dans des opérations stratégiques, impliquant des informations critiques qu’elle est seule à pouvoir produire, l’empêchant ainsi de réaliser les traitements périodiques avec la fréquence et le rythme habituels.
– …etc.
Ainsi, que ce soit pour des sujets pointus, ou de circonstances ponctuelles, le recours au conseil externe s’avère fort utile. Néanmoins, comme précisé ci-dessus, le conseil reste dans un rôle de support, et le pilotage de la consolidation reste du ressort des équipes internes.
La nature de l’information consolidée
L’information financière consolidée en interne revêt un large spectre qui peut aller d’un niveau très agrégé, à savoir le minimum d’information externe devant être communiquée au public à un degré très détaillé dans lequel l’information de gestion analytique et même opérationnelle est centralisée par le département de consolidation avec un niveau de granularité très fin. Dans ce dernier cas, on peut observer dans certains groupes une vraie plateforme de données décisionnelles alimentée par les différentes ramifications du groupe est pilotée par une direction de consolidation et de contrôle de gestion, en tant que business process owner du processus décisionnel à l’échelle du groupe.
Les impératifs en termes de confidentialité et gestion des habilitations d’accès aux données s’en trouvent également impactés reflètent généralement le degré de transversalité de l’information consolidée.
Un autre élément vient se rajouter à ce niveau de granularité de l’information à savoir le degré d’homogénéité des activités du groupe.
Ainsi, certains groupes sont construit autour d’une intégration verticale ou horizontale des activités. Cette complémentarité des activités se traduit au niveau du processus décisionnel qui reste prédominant au niveau opérationnel. On retrouve cela notamment dans des groupes industriels ou commerciaux, dans lequel, le centre de décision du groupe intervient également au niveau de l’excellence opérationnelle des filiales, en essayant de capitaliser sur les effets de synergies industrielles et commerciale qu’offre cette intégration du groupe.
D’autres groupes, caractérisés par une diversité des activités, qui malgré la synergie qui peut persister, sont caractérisés par une prédominance d’une excellence financière, qui reste le point commun de toutes les filiales.
L’information consolidée, peut dans le premier cas être plus riche sur le plan opérationnel est plus orientée métier et activité, alors que dans le second elle sera plus orientée vers l’information purement financière ainsi que des indicateurs de performance financiers.
Il demeure que l’organisation internalisée de la consolidation permet justement cette richesse de la fonction de consolidation en lui permettant de contribuer activement au pilotage des activité au niveau du groupe par l’enrichissement de l’information de décision au niveau souhaité par le mangement central.
Le système d’information
Étant donné la richesse de l’information évoquée ci-dessus, ainsi que la forte interdépendance entre l’équipe centrale et les directions des filiales, l’outil de consolidation joue un rôle primordial dans l’efficacité de l’organisation interne.
En effet, la volumétrie des données augmente avec la fréquence des reporting, l’enrichissement du contenu et l’ancienneté des données comparatives de gestion. En outre, la complexité des traitements à automatiser et le besoin d’impliquer les filiales tout en gardant un niveau de contrôle des données font de l’outil de consolidation une nécessité pour le département interne de la consolidation.
Le système d’information va permettre ainsi quatre fonctions clés :
– La collecte des données à travers tout le groupe de manière homogénéisée.
– Le contrôle des données informatisée permettant de minimiser les incohérences et les incomplétudes.
– L’automatisation des traitements permettant de gagner du temps et de minimiser les erreurs de saisie ou de calcul.
– La restitution des données consolidées.
En fonction de la nature de l’information consolidée, le système d’information sera également enrichi en conséquence. D’où l’intérêt encore une fois de disposer d’un outil ai sein du groupe qui permet de faire évoluer le processus de consolidation en fonction des besoins à la fois internes et externes.
A suivre ..
Après avoir décrypté l’organisation internalisée de la consolidation financière, nous aborderons dans la deuxième partie de cet article l’organisation internalisée, et dresserons une analyse comparative des deux modèles.
Restez à l’écoute ..
Lire aussi
+
La consolidation des comptes : doit-elle devenir une obligation au Maroc ?
+
Devenir consolideur : compétences clés et défis du métier
+
Les IFRS : un catalyseur pour l’expansion internationale
Nos associés
Contactez-nous
DECOUVREZ NOTRE BUREAU
N°1, IMM 12 MADINAT AL IRFANE RABAT | MAROC
© Copyright 2023 CONSO-PLUS. Tous droits réservés.
Conditions générales d’utilisation Mentions légales Plan du site FAQ